Lire McCarthy est une expérience unique et marquante. Ce roman crépusculaire, d'une grande mélancolie nous bouleverse et nous déstabilise : on le finit avec plus de questions que de réponses. Mais quel plaisir de lire une telle plume ! Un chef d’œuvre de la littérature américaine.
Le dernier livre de Erri de Luca est un "recueil", selon ses propres mots, qui traite de la situation de la filiation - condition partagée par la totalité des humains sans exception. En écrivain véritable, il ne s'égare pas dans les voies moyennes, mais explore les pires : le sacrifice d'Isaac, l'insupportable situation d'une fille de nazi... Échos terribles de la rupture avec son propre père devant lesquels nous ne pouvons que nous "recueillir". Densité et dépouillement : un grand texte de ce début d'année.
La formidable vitalité romanesque de Colson Whitehead opère à nouveau dans ce roman du Harlem des années 60. Le Harlem noir bien entendu, celui de la vie quotidienne, des activités frauduleuses et des émeutes raciales. La magie de la langue nous plonge dans ce monde aussi tumultueux que meurtrier, toujours d'actualité. Après ses deux romans précédents couronnés par le prix Pulitzer, un nouvel opus flamboyant.
La dernière parution de Jean-Michel Maulpoix entre en résonance avec le prochain thème du printemps des poètes débutant ce 11 mars : Frontières. Suivez ce chemin de courts textes poétiques en prose, où la peur du vieillissement et de la disparition est atténuée par le jaillissement de l'enfance, l'écho de poètes aimés, et la lumière offerte par la pureté de la neige au plein cœur de l'hiver. "Durant toutes ces années, il me semble avoir marché sans cesse au bord de ma propre existence, guettant les crépuscules, les aubes, les printemps, les automnes, les rivages, les lisières, les belvédères et les terrasses, toutes ces frontières imaginaires où l'on peut croire que le temps et l'espace vont s'ouvrir sur une vie nouvelle." Une belle citation à méditer en ouverture du Printemps des poètes, que nous fêterons à l’occasion de la venue de la poètesse Marie Cosnay, le samedi 25 mars à 11 h : Marie Cosnay, traductrice de textes antiques, romancière et poète, viendra nous parler de ses dernières parutions : « Des Îles » (L’Ogre, 2023), « Nos corps pirogues » (L’Ire des marges, 2022), « Les Métamorphoses d'Ovide » (Livre de poche)... dans le cadre de sa résidence d’écriture à Sigonce, avec l’association DÉSIRDELIRE.
Le grand Paul Auster revient avec cet essai incisif sur la violence armée, propre à la société américaine, qui nous sidère à chaque nouveau massacre dans une école ou autre. La puissance de sa réflexion résulte d'une relecture de l'histoire américaine, faisant de la prolifération des armes, non la cause, mais le symptôme de maux historiques, de l'anéantissement des peuples autochtones par les colons jusqu'à la prise du Capitole fomentée par Donald Trump. Accompagnée des photos de Spencer Ostrander, cette réflexion en vérité nous aide à comprendre à quel point la République américaine se trouve à la croisée des chemins.
Mademoiselle Sophie, institutrice en CM2, est revenue de vacances extrêmement grosse, et cela n’a pas manqué d’attirer l’attention de Romain 11 ans, bientôt 12. Le jeune garçon se met alors en tête de comprendre cet étrange changement… Un très beau récit, un dessin simple et coloré pour aborder avec sensibilité et une légère pointe d’humour le passage de l’enfance à l’adolescence.
Florence Dupré La Tour a de l’humour, et lorsqu’elle nous raconte son enfance, elle excelle ! Après Pucelle (2 tomes) où elle décrit son rapport à la féminité durant son enfance et son adolescence, elle s’attaque dans Jumelle à son rapport fusionnel avec sa sœur jumelle. Son humour mordant présente une relation faite de bonheur mais aussi de souffrance et de questionnements. Un récit bien drôle !!
Hôjô Tokiyuki a un destin prometteur : hériter d’un empire. Son clan se faisant décimer, il n’a d’autre choix que de fuir. Sa méthode préférée. Une aventure effrénée au cours de laquelle notre prince samurai devra éviter ses ennemis, tout en reconquérant son royaume. Par l’auteur de la série Assassination classroom.
19 ème siècle. Un ingénieur et un samouraï se retrouve en Amérique après avoir dérivé en mer depuis le Japon. Fauchés, ils décident de gagner leur billet de retour, en participant à la course folle qui traverse les USA. Fabriquant de toutes pièces une voiture à vapeur, leur voyage sera semé d’ennemis et d’environnements hostiles. Arriveront-ils au bout de la course ?
Troublant récit d'un jeune homme métis indien, accompagnant son père détruit par l'alcool mourir dans les montagnes de l'Ouest. Rude voyage à travers la Colombie britannique. Magnifique aventure dans les grands espaces d'une Amérique sauvage. Retour dans un passé violent qui a séparé ces deux êtres. Entre désespoir et solitude intense, deux beaux moments de vie viennent se heurter à la noirceur de l'homme. Le roman éponyme de Richard Wagamese est ici sublimé par le crayon de Vincent Turhan. A lui seul, le titre nous fait une promesse poétique : les étoiles se couchent à l'aube...
Lire un roman d'une autrice népalaise, ça n'arrive pas tous les jours. Quelle découverte ! On suit Lhamo et Tenkyi, deux sœurs ayant fuit le Tibet en 1960 avec leurs parents, suite à l'invasion chinoise. Elles se réfugient dans un camp tibétain au Népal. L'arrachement à la terre natale, la colère et la souffrance de ce peuple, nous saisissent, et nous partageons avec émotion leurs peines et leurs espoirs. C'est la douloureuse histoire de l'exil, cette lecture nous rappelle de ne pas oublier !
L'histoire de Sandrine Collette suit un couple et leur enfant en pleine nature, défaite des cadres socio-économiques dans lesquels nous vivons aujourd'hui. Une nature rendue à son état premier où l'on chasse pour se nourrir. Quel intérêt ? Celui de rendre à l'homme son état premier et de (ré)découvrir ce qui fait le fond de son agir, pour le meilleur et pour le pire. Une pépite.
L'histoire se passe avant la grande révolution de mai 68, dans une ferme du Cantal. La mère est une femme abîmée par la vie, par les grossesses successives, par son corps qui enfle sous les coups de son mari. Que va t-elle faire ? Subir ou fuir ? Dans ce roman concis, précis, d'une écriture dense, Marie Hélène Lafon ne porte pas de jugement, ne prend pas partie. Elle expose. Et ça explose!
Comme un voyage, vieillir se prépare. C'est dans cette proposition que l'auteure nous engage à considérer cette période de la vie comme une aventure. Vivre cette période pour ne pas la subir, dans la joie, la transmission, le service, les projets et la tendresse...
Une femme dont on découvre le passé en bribes éparses, survit dans une forêt depuis plusieurs années. On ne sait rien d'elle si ce n'est sa détermination, sa volonté, l'organisation de sa vie. Mais à quel prix? Lorsque des hommes arrivent sur son territoire sa vie bascule, le roman aussi. Vous ne pourrez plus lâcher ce livre tant l'envie de savoir et de comprendre sera forte. L'écriture est au service du suspens et nous entraine dans le questionnement toujours actuel de nature/culture.
Plongez dans le quotidien d'un village de bûcherons dans les années 1970 aux Etats-Unis. Rich, Colleen et leur fils Chub, deviendront au fil des pages des amis, et nous lecteur, leur confident. Les derniers géants, c'est un cri d'amour à la forêt, à ses arbres multi centenaires, qui sont mémoire et témoin de la grandeur de la Nature, mais aussi à ces métiers pénibles et dangereux que doivent faire ces hommes pour vivre. Un roman familial attachant et bouleversant,un livre engagé, un vrai coup de cœur !
Écrivain de chez nous, Claude Rouge signe depuis Saumane (Alpes-de-Haute-Provence) un nouveau roman. Il évoque, la vie quotidienne, aujourd’hui après la pandémie et les gilets jaunes, de 7 personnages dans un « pays » loin des grandes métropoles, qui pourrait être le nôtre. Si Lucile est professeur, tous les autres ont, ou ont eu, des « petits métiers », indépendants. Chacun à sa manière, ils ont tous perdu dans les deux crises récentes une partie de ces repères qui font que l’on a la maîtrise de son quotidien. Et, par-dessus le marché, un vent du sud tenace envahit la nature d’un sable jaunâtre qui pourrait bien être la cause d’une crise latente qui rend chacun intranquille : c’est la Pagaille ! Loin d’apporter une solution-miracle, le récit est la recherche, par chacun, d’une liberté retrouvée qui dépasserait les barrières du renfermement sur soi. Un regard sur la vie d’aujourd’hui donné dans une langue où les mots parlent comme des notes (l’auteur est aussi musicien et chanteur). Françoise ROUGIER Retrouvez l'article entier de Françoise Rougier : https://www.hauteprovenceinfo.com/article-39605-ecrivain-de-chez-nous-claude-rouge-signe-depuis-saumane-un-nouveau-roman.html
Un instant suspendu où les heures sont abolies. Lou Darsan et son compagnon vont vivre une expérience unique : un hiver dans le grand Nord, où l'obscurité et le froid mangent tout. Contemplation, souvenirs des temps chauds, balades et impressions, songes surréalistes, tout devient sujet d'écriture pour Lou Darsan, qui partage cet instant de vie avec délicatesse et grâce. Un réel plaisir de lecture pour une échappée libératrice ! Une écriture magnifique !
Un enfant qui ne croyait pas aux histoires, une puce meurtrière, des pantoufles terrifiantes, un roi qui a perdu sa calculette... et pleins d'autres histoires courtes aussi drôles et surprenantes les unes que les autres !! Une petite merveille !
Blancaflor, fille d'un cruel ogre et d'une terrible magicienne, est une jeune femme dotée de pouvoirs extraordinaires. Un beau jour, son père décide d'inviter un jeune prince chanceux à relever un défi impossible ! Tombée sous le charme du jeune homme, Blancaflor fait tout pour qu'il réussisse trois épreuves extrêmement difficiles... Une belle découverte d'un conte d'Amérique latine mettant en avant un personnage féminin fort et indépendant !
Nous vivons rangés, à moitié morts, à avaler tout ce qu’on nous met dans la gueule. Nous tuons les tueurs pour les soulager de tuer. Nous nous tuons nous-mêmes pour ne tuer personne. Et c’est ainsi chez le voisin, chez la voisine, dans toutes les familles. De génération en génération. » Ce roman raconte, en deux parties, les efforts d’Elsa, mangée par sa mère, pour ne tuer personne. Le texte est épuré, si imagé qu’on a parfois l’impression de lire une bande-dessinée. Aucun mélodrame. Seulement la description colorée d’une relation qui déteint.
Nous sommes aux Etats-Unis, dans la capitale du Kansas, et c’est le jeune Adam, champion de débat et d’improvisation au lycée, qui est au centre de ce livre. Ben Lerner analyse, avec son regard acéré, le noyau familial de la classe moyenne américaine, les dérives et les tensions sous-jacentes, les petites lâchetés, et nous offre un grand roman, dont le pouvoir du langage est le vrai sujet. A lire !
Après « Croire aux fauves », récit au pays Even, où Nastassja Martin a rencontré un ours qui aurait pu la tuer, elle revient dans ce nouveau livre sur la destinée de ces populations du Kamtchatka qui ont fait le choix de renouer avec la vie sauvage après l'effondrement soviétique. Que retrouvent-elles de leurs racines d'éleveurs de rennes ? Quelle place occuper dans ces régions où le néocapitalisme sévit aussi ? Plutôt que de plonger dans le folklore, cette région "à l'est", celle de l'aube, est un appel à un renouveau, à une vie réinventée, face aux crises systémiques.
Lucien est le balayeur du parc, un bonhomme imposant, une tête de gentil, un peu simple d’esprit. Son quotidien suit la même routine, et cela lui convient. Pourtant, les rencontres et les imprévus de la vie vont complètement bouleversés son existence… Une bande dessinée surprenante autant au niveau du scénario que de la qualité des dessins ! Un conte moderne, sombre et poétique…