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Chemin De Fer
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Le livre réunit deux nouvelles qui se font écho et qu'il faut lire comme deux épisodes de la vie de Gilles. Gilles c'est le frère de Claire et Isabelle, qui étaient les personnages du dernier roman de Marie-Hélène Lafon, Les sources.
Si la première partie "La confession" évoque le personnage de la Nini, qui fait le catéchisme aux enfants, c'est bien Gilles qui est au coeur du texte. Gilles enfant, qui imagine l'enterrement du père, qui a hâte d'être un homme sans bien savoir ce que cela veut dire. Gilles incapable de trouver les mots pour se confesser, car ce sont des pensées et des pulsions intimes qu'il faudrait dire.
Dans la seconde, "Cinquante ans", Gilles est devenu adulte. Sa soeur Claire qui habite Paris revient dans la ferme familiale pour quelques heures. Les usages et habitudes de la maison, les souvenirs de la vie d'avant lui reviennent, mais c'est Gilles qu'elle attend et redoute en même temps. Gilles, le taiseux qui, contrairement à elle, n'a pas quitté le monde d'où tout deux viennent, son frère qui reste littéralement embourbé dans la terre qui l'a vu naître.
Vie de Gilles est un double portrait dans lequel le lecteur retrouve les sources, les lieux et l'univers de Marie-Hélène Lafon : le Cantal, la vallée de la Santoire, le monde paysan et la ferme isolée d'où elle vient, auxquels son oeuvre revient sans cesse et que son écriture creuse et transfigure depuis de nombreuses années. -
La vie fragile
Virginie Billaudeau, Louise Pommeret
- Les éditions du Chemin de Fer
- 14 Mars 2025
- 9782490356522
C'est une maison à la veille de sa démolition. Demain les hommes de la route viendront et effaceront le lieu.
Une femme passe la nuit en ce lieu déserté, ce sont les dernières heures de ceux qui l'habitent encore et ne peuvent le fuir. Les voix humaines se sont depuis longtemps tues, l'heure est venue d'en entendre d'autres. Des voix qui ont fait le lieu, qui ont vu la ferme sortir de terre, la vie s'y déployer. La femme vient recueillir l'histoire d'un siècle : en 1910 il y a eu les Marsand, trois générations de fermiers. Puis l'homme qui s'est installé quand la lignée des paysans s'est éteinte. Enfin elle, l'échouée, venue trouver refuge il y a quelques années. -
Le 3 décembre 1956, l'abbé Desnoyer, curé à Uruffe, tue sa maîtresse, Régine Faye, 19 ans, qu'il a mise enceinte, d'un coup de revolver puis l'éventre à l'aide d'un canif, tue le foetus (âgé de huit mois et donc viable) et le défigure à coups de couteau pour qu'on ne puisse reconnaître qu'il en est le père. Ce fait divers sordide défraye la chronique des années 50 et 60 et hante la littérature française.
De son crime, le curé d'Uruffe ne s'expliqua jamais. Silence de la foi. Silence au procès. Silence en réclusion. Silence dans l'obscurité d'une abbaye du Morbihan qu'il rejoignit à sa sortie de prison en 1978 et ce jusqu'à sa mort en 2010..
C'est à ce silence que tente de répondre Hubert Gonnet avec Le grand scandale roman monstre à plus d'un titre. Par son personnage d'abord, inspiré du curé d'Uruffe. Par sa structure ensuite, puisque ce roman qui se déploie sur plus de 500 pages est constitué de deux récits qui se font face, page de gauche, page de droite, mélodie et accompagnement comme les appelle l'auteur dans son avertissement au lecteur qui introduit le livre.
Page de gauche donc, le récit de l'enquête qui suit le meurtre de Rose Médieu jusqu'au procès de l'abbé Jacques Dupin. Page de droite, le monologue intérieur du prêtre, sa "confession", tentative de saisir la complexité, les contradictions d'un homme d'Église qui préféra le crime au suicide car l'Église interdit le suicide.
Gonnet choisit d'entrer dans la psyché de l'abbé par un redoutable stratagème, livrant deux romans en un. Mais en véritable démiurge, il sait agencer les vis-à-vis pour que la lecture reste toujours fluide.
Le grand scandale tient autant des grands romans bernanosiens sur le fond, passionnante réflexion sur le mal, ses racines et leur intrication au sacré que du Nouveau Roman par sa forme. -
Passé, présent et après
Loriano Macchiavelli
- Les éditions du Chemin de Fer
- 15 Janvier 2025
- 9782490356492
Bologne, années 1970. Alors que les étudiants manifestent dans les rues, Sarti Antonio est chargé par son supérieur, Cesare Raimondi, de surveiller le palais du Roi Enzo, où se tient une exposition de pièces précieuses provenant du monde entier. Un matin, il découvre que les trois pièces les plus rares et les plus précieuses se sont mystérieusement envolées. Sanctionné, le sergent est affecté, en compagnie du fidèle Felice Cantoni au volant de la voiture 28, aux rondes de nuit dans le quartier du Pilastro, construit à la périphérie de la ville pour accueillir les immigrés venus du sud de l'Italie. C'est dans ce « ghetto » que Sarti Antonio rencontre un soir Claudio, 11 ans, qui démonte et vole les pneus d'une voiture. Entre les deux que tout oppose naît une véritable amitié. Et si le Pilastro marque à jamais le destin du jeune Claudio, c'est grâce à lui, et bien entendu avec l'aide de Rosas, l'éternel étudiant révolutionnaire, qu'à force d'obstination notre sergent parviendra à retrouver le coupable du vol des pièces précieuses.
Dans cette nouvelle aventure cruelle et tendre, Loriano Macchiavelli n'a de cesse de malmener son enquêteur en proie à un monde dominée par ceux dont la seule préoccupation est le pouvoir et l'argent. Il le plaint, le rudoie, l'aime parce qu'il est imparfait et boit autant de café que lui. Pour notre plus grand plaisir. -
Mon travail d'écrivain n'autorise à mes yeux aucune concession : Lettre à Federico Mayor
Claude Simon
- Les éditions du Chemin de Fer
- 15 Janvier 2025
- 9782490356508
En 1986, Claude Simon, convié par l'écrivain Chinghiz Aitmatov, accepte de participer au Forum d'Issyk-Kul, au Kirghizstan, en compagnie d'autres invités de marque, dont Peter Ustinov, James Baldwin et Arthur Miller. Le forum se tient du 14 au 17 octobre 1986. Dix-huit éminents créateurs du monde entier, les figures les plus célèbres et les plus importantes dans le domaine de la littérature, de la culture et de l'art de l'époque, sont réunis, en pleine Perestroïka, pour discuter, excusez du peu, des problèmes globaux de l'avenir de l'humanité à l'aube du 21e siècle, et échanger leurs points de vue à ce sujet. Lors du voyage de retour, les invités sont reçus par Gorbatchev, à Moscou.
De retour en France, Claude Simon reçoit la déclaration finale du Forum, qu'il refuse tout d'abord de signer, tant elle lui semble insignifiante au regard des enjeux que le Forum souhaitait embrasser. Sur l'insistance de Federico Mayor, directeur adjoint de l'Unesco (il en deviendra le directeur général en 1987), il accepte finalement de la signer. Quelques semaines plus tard, Claude Simon écrit une longue lettre à Federico Mayor pour lui exposer ses nombreuses réserves. De larges extraits de cette lettre sont publiés en novembre 1986 par le journal Le monde. Nous la publions aujourd'hui dans son intégralité, sous le titre "Mon travail d'écrivain ne mérite à mes yeux aucune concession". Elle peut être considérée comme une véritable profession de foi d'écrivain et d'intellectuel et poursuit la réflexion que Claude Simon avait amorcée l'année précédente en rédigeant le discours de Stockholm pour la remise du prix Nobel, en insistant cette fois sur le rôle que tout créateur peut avoir en tant que citoyen, engagement qui ne pourra et ne devra jamais se faire au détriment de l'acte de création. -
Un homme amputé de la jambe droite est retrouvé nu, échoué sur la plage interdite de Crizal, le corps entièrement recouvert de tatouages multicolores. Il ne s'exprime que par des cris. Parlerait-il la langue des oiseaux ? Dans un monde dystopique guetté par le totalitarisme, c'est peut-être une écriture et un langage nouveau que porte le nageur unijambiste, susceptible d'ouvrir grand la porte sur le rêve et l'imaginaire.
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Ce qui est resté d'un Rembrandt déchiré en petits carrés bien réguliers, et foutu aux chiottes
Jean Genet
- Les éditions du Chemin de Fer
- Micheline
- 1 Juin 2013
- 9782916130545
Ce qui est resté d'un Rembrandt déchiré en petits carrés bien réguliers, et foutu aux chiottes a été publié pour la première fois dans la revue Tel Quel en 1967. Le titre doit être pris littéralement : en 1964, suite au suicide de son compagnon, Jean Genet détruit les manuscrits sur lesquels il travaille, dont un consacré à Rembrandt. Quelque temps auparavant deux fragments en avaient été confiés à un traducteur, ce qui les sauve de la destruction.
Pour Tel Quel, Jean Genet les place en vis-à-vis sur deux colonnes, faisant de l'un le commentaire de l'autre, mise en forme radicale qui laisse entendre que toute parole est double.
Le premier fragment fait allusion à un épisode fondamental de sa vie : «un jour, dans un wagon, en regardant le voyageur assis en face de moi j'eus la révélation que tout homme en vaut un autre». Cette expérience profondément humaniste est mise en regard du second fragment où il évoque sa fascination pour les peintures de Rembrandt.
L'épisode du train apparaît alors pour lui comme un événement aux conséquences fondamentales : si tout homme en vaut un autre, la puissance érotique se délite, tout individu devenant le sujet possible de l'art.
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Rue Castellana Bandiera
Emma Dante
- Les éditions du Chemin de Fer
- Les Pas Perdus
- 13 Septembre 2024
- 9782490356461
La rue Castellana Bandiera est une rue étroite de Palerme, à double sens, où deux voitures pourtant ne peuvent se croiser. La voiture de Rosa s'engage dans la rue au moment où celle de la famille Calafiore, conduite par Samira, arrive dans le sens opposé. Ni Samira ni Rosa ne sont prêtes à faire marche arrière. Ce sont deux mondes qui d'ordinaire ne se rencontrent jamais qui s'affrontent, deux femmes bien décidées à prendre leur revanche sur les blessures que la vie leur a infligées.
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Bologne. Années 70. Un attentat détruit le centre de transmission de l'armée, faisant quatre morts et de nombreux blessés. Le sergent Sarti Antonio, flanqué de son acolyte Felice Cantoni, mène l'enquête. Entre milieux interlopes et notables intouchables, c'est tout un système de corruption qui est à l'oeuvre et qu'il tente de dénoncer en dépit de la résistance de ses supérieurs, alors que les meurtres se multiplient dans la ville. Les jours de la peur est l'acte de naissance de l'un des plus féconds personnages de la littérature italienne, le sergent Sarti Antonio. Un policier médiocre, atteint d'une colite chronique qui l'oblige sans cesse à se rendre aux toilettes. Il serait sans doute un antihéros s'il n'était doté d'un sacré esprit de contradiction et d'une belle ténacité. Et il échouerait sûrement dans son enquête s'il n'avait trouvé sur son chemin un étudiant extraparlementaire, Rosas, disposé à l'aider dans ses réflexions. C'est aussi le roman par lequel une ville, Bologne, accède à la littérature, auscultée sous toutes ses coutures au moment où elle se transforme, au milieu des années soixante-dix, rarement pour le meilleur. Ce qui est exceptionnel dans ce roman, c'est le rythme, l'ironie qui n'abandonne jamais le narrateur (personnage à part entière) qui commente sans relâche les actes de son personnage, ses relations avec son coéquipier (à eux deux ils cumulent l'ulcère, la colite, le café, les cigarettes) ou avec son supérieur qui ne cesse de l'humilier. Avec ce premier roman, Macchiavelli met en place tous les éléments qui feront la fortune et le succès de son personnage et de la série des Sarti Antonio. Et qui le feront entrer dans l'histoire du noir italien.
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Suzanne, c'est la mère de Denis Belloc. Tout commence dans la banlieue ouvrière de La Rochelle en 1929. Nazaire et l'Andalouse mettent au monde Suzanne. La misère dans laquelle elle grandit est immense, la violence parfois insoutenable. À 16 ans, Suzanne rencontre Lucien dont elle tombe éperdument amoureuse et l'épouse. L'Andalouse meurt. Ils élèvent ensemble le frère et la soeur de Suzanne et bientôt deux enfants. Mais la misère colle à la peau, quand Lucien a bu, personne ne peut le maîtriser. Suzanne s'accroche malgré le désastre de son mariage. Elle reste debout face aux drames, aux tromperies et à la mort. Marguerite Duras, commentant le livre, avance le concept de "nuit sociale", et évoque "un grand et terrible roman politique", celui de la misère dans la France des années quarante. Avec une interview de D. Belloc par Marguerite Duras et une postface de Patrick Autréaux.
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Renata n'importe quoi
Catherine Guerard
- Les éditions du Chemin de Fer
- Micheline
- 6 Novembre 2021
- 9782490356294
Lassée de servir ses patrons, la protagoniste réclame son indépendance du jour au lendemain. Elle passe alors trois jours et deux nuits d'errance dehors, découvrant le monde dans un long monologue constitué d'une seule phrase.
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Nucléus, ce qui reste, quand il n'y a plus rien
Zinaïda Polimenova
- Les éditions du Chemin de Fer
- Les Pas Perdus
- 1 Mars 2024
- 9782490356416
Une fresque haletante dans la Bulgarie des années cinquante. Un groupe d'amis, ingénieurs et architectes, travaille à la construction d'une usine qui devra être le symbole de la modernité du pays. L'histoire commence quand le groupe part pour un échange en Allemagne de l'Est, fleuron industriel du bloc communiste. Parmi eux, Theodor, étroitement surveillé par le régime, se lie d'amitié avec Emil, fils d'un artiste allemand dont l'oeuvre est désormais interdite car jugée subversive. À son retour, Theodor est arrêté sans raison et déporté à Béléné, l'un des plus terribles camps du pays... Zinaïda Polimenova signe un roman poignant sur l'arbitraire du régime communiste bulgare et son absurdité technocratique. A l'origine du livre, un album de photographies anonymes, chiné aux puces de Sofia qui semble documenter un voyage professionnel ou syndical en RDA, un échange entre deux délégations communistes. A partir des photographies de ces hommes et femmes souriants, elle imagine quelle aurait pu être la « véritable » histoire de ce voyage, en-deçà et au-delà des apparences pour retracer l'histoire de son pays dans les plus dures années du totalitarisme.
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Marceline Lantier est une vieille dame indigne qui vit de rapine, d'animaux braconnés et de mauvais vin rouge, à l'écart des autres villageois. Alors qu'elle ramasse du bois mort dans la forêt, elle croise Yann Rosengold, étudiant en sociologie qui décide d'en faire son sujet. Le jeune homme et la vieille femme s'observent, se méfient, les mots volent haut, fort et cru. Yann prend soin de Marceline qui petit à petit se laisse faire. Comme toujours dans les romans de Beck, la vie passe en un clin d'oeil, la mort aussi. Marceline meurt. On suit alors la vie de Yann, précepteur chez une aristocrate, marié à une de ses étudiantes, professeur reconnu et père de famille comblé avant de se voir rattraper par son passé. Les deux parties du roman seraient apparemment sans lien si Béatrix Beck n'avait pris soin de semer, comme des cailloux blancs, quelques repères renvoyant à ce qui émaillait naguère les échanges de Yann et Marceline : la mort, le racisme ordinaire, l'antisémitisme...
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Deux frères amoureux de soeurs jumelles similaires en tout point décident de s'en remettre au sort pour savoir qui épousera qui. Mais au bout de deux ans, le frère aîné découvre qu'il est amoureux de la femme de son frère cadet et que ce sentiment semble réciproque. S'ensuivent manoeuvres, scandales et fuites, jusqu'à la révélation finale.
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Traversée sensuelle de l'astronomie
Jean Giono
- Les éditions du Chemin de Fer
- Micheline
- 3 Novembre 2022
- 9782490356331
Avec Traversée sensuelle de l'astronomie, Jean Giono célèbre la splendeur céleste et l'immensité de l'univers. Sous sa plume éclatante de précision et de lyrisme,
la course des astres, l'infini du temps et de l'espace deviennent l'ultime énigme à laquelle l'homme ne pourra jamais se mesurer et devant laquelle il lui faut s'incliner. La science a beau nous dire que la vitesse de la lumière est de trois cent mille kilomètres par seconde, notre instinct lui répondra toujours que la lumière est immobile. Pour Giono, c'est précisément la nécessaire modestie qui nous est imposée face à cette démesure qui peut nous permettre de préserver la liberté et la sagesse humaine. Écrit en 1938, alors que les progrès de la technique et de l'industrie faisaient perdre aux hommes le lien avec la nature et que le fracas de la guerre se rapprochait, Traversée sensuelle de l'astronomie est un texte visionnaire à bien des égards tant l'observation poétique invite à une réflexion profonde et incroyablement clairvoyante sur nos aliénations contemporaines.
Initialement publié dans La revue de Paris, Traversée sensuelle de l'astronomie est intégré ensuite au Poids du ciel, essai polémique et profus. Lui redonner une vie autonome permet aux lecteurs d'en découvrir toute la beauté et la puissance.
"À quatre kilomètres d'altitude, le ciel est bleu marine. À huit kilomètres, il est violet sombre. À dix kilomètres, le ciel est noir et poussiéreux comme un écroulement de suie. À vingt kilomètres de hauteur, le ciel est plus noir que le ciel de la plus noire nuit malgré l'éclatant soleil, et malgré le soleil de grosses étoiles vertes le déchirent. D'ici, les bonheurs commencent à se voir en bas sur la terre : un grand morceau de continent, assez étendu pour qu'on puisse en comprendre la composition et l'économie. Des grappes de montagnes, l'eau qui ruisselle, le discours logiquement déroulé des vallées à travers toutes les raisons géologiques des roches, les conclusions des plaines où déjà la plupart des mystères sont mis à la portée de l'homme. La mer ; les contours des caps, des promontoires, la flexion des golfes, l'élan général des terres qui bordent la mer, se prolongeant à ses côtés, avec toutes les tentatives d'amour réciproque des deux matières. Des troncs de fleuves. À cinquante kilomètres de hauteur, le ciel n'est plus un plafond ; il est à l'intérieur d'un océan de ténèbres. L'énorme soleil ne cache rien." -
Nouvelles de prison
Albertine Sarrazin
- Les éditions du Chemin de Fer
- Micheline
- 4 Avril 2019
- 9782490356065
Je suis arrivée ici révoltée et bien décidée à ne rien fiche. Puis... il a bien fallu que je me mette au pas. Dix ans, ça fait long. On finit par comprendre qu'il vaut beaucoup mieux se ménager une petite détention pénarde et apprendre tout ce que l'on peut. - Le cachot, en hiver surtout, ça finit par coller des rhumatismes. Maintenant je travaille?: du service général, du bricolage?; je lis et j'écris à mes moments de loisir. Seulement, y a qu'une chose que le personnel n'a jamais pu m'ôter de la tête - c'est mon goût presque maladif de la solitude.
C'est en prison qu'Albertine Sarrazin a écrit ses deux romans autobiographiques, La cavale et L'astragale. C'est là également que fut rédigé son journal, déclaration d'amour à Julien, où dominent l'introspection et la recherche de soi.
Les nouvelles qui composent ce recueil, écrites également en prison, puisent toujours aux sources de l'autobiographie, mais dévoilent un autre visage d'Albertine Sarrazin?: celui de l'observatrice qui pose un regard empreint de gouaille, de légèreté et de tendresse sur l'univers carcéral qui fut son monde pendant huit ans. Compagnes d'un jour, amies de coeur ou de malheur, garde-chiourme détestables ou gardiennes justes, Albertine Sarrazin campe la comédie humaine à l'oeuvre dans ce huis clos qui, par la grâce de son style inimitable, devient expérience littéraire.
Un dernier texte, écrit après sa libération, clôt le recueil?: Albertine se voit décernée en 1966 le prix des Quatre Jurys. Elle écrit «Voyage à Tunis» pour décrire son émerveillement de prendre l'avion, de retourner dans son Maghreb natal, mais sait faire preuve d'une ironie féroce et pleine d'humour lorsqu'elle se peint égarée au sein de ce milieu littéraire qui n'est pas sans lui rappeler la communauté carcérale.
Ces nouvelles ont été publiées pour la première fois en 1973, aux éditions Sarrazin.
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Quand le jeune Antoine Villaert croise le Général lors d'un dîner, il est loin d'imaginer que la passion vient d'entrer dans sa vie...
Publié pour la première fois en 1955, Ces princes est la chronique alerte d'un amour qui, comme tout amour de littérature, voit le jour, fleurit puis, selon les cas, mûrit, éclate, ou meurt.
Catherine Guérard joue d'une langue d'un classicisme ciselé et parfaitement maîtrisé qui ne masque pas la puissance et la profonde originalité de ce conte aux accents stendhaliens.
Car si le roman emprunte au vaudeville et au marivaudage, les amants y sont, excusez du peu en 1955, un général et un aspirant polytechnicien. Ce glissement de genre aurait pu être le propos du livre mais le génie indocile de Catherine Guérard est de ne pas faire de l'homosexualité le sujet de Ces princes, à peine un détail face à l'évidence d'un amour absolu que seule la guerre parvient à faire vaciller. Ce n'est pas à la morale ni aux conventions bourgeoises que se heurteront Antoine et le Général mais aux responsabilités de l'homme de guerre d'un côté, à la fougue passionnée du héros romantique de l'autre.
Ces princes est le premier roman de Catherine Guérard, autrice rare qui publiera douze plus tard Renata n'importe quoi, et qui fait aujourd'hui figure de météore incontournable de la littérature française.
"Et lorsque le monde craque et que les bruits sinistres des folies humaines se font entendre, l'amour ne meurt pas, mais c'est un amour qui devient triste."
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Noémi Duchemin est une enfant surdouée, née dans une famille dysfonctionnelle, élevée dans une décharge, recueillie après un drame familial par mademoiselle Minnier, institutrice rigide qu'elle vénère jusqu'au désenchantement lorsqu'elle découvre ce que sa sollicitude signifiait.
Nul doute que La décharge est l'oeuvre maîtresse de Béatrix Beck. C'est un roman qui, dans sa profusion, son exubérance et son extrême liberté, concentre tous les partis pris qui rendent l'autrice irremplaçable. Qui saurait aujourd'hui donner vie à une telle héroïne ?
Béatrix Beck ose tout, montre tout, renverse toutâ€...: le déterminisme, la bêtise, les conventions, les superstitions, les marges, l'inceste ou la mort sont broyés, disséqués, au fil d'un texte monstrueusement prolifique. Bien au-delà de la satire sociale, La décharge est un monument scandaleusement généreux de littérature porté par la plume alerte de Béatrix Beck et sa capacité inépuisable d'étonnement. Elle emprunte au langage populaire, s'amuse des rythmes, se joue du verbe pour le plus grand bonheur du lecteur qui en sort estourbi mais réjoui.
Rob Miles relève le défi d'accompagner en image ce roman foisonnant. Il multiplie les points de vue, parsème ses dessins d'indices et de références au texte tout en bousculant l'espace et sa logique. Lui aussi brise avec malice la convention d'une représentation linéaire. Gageons que Béatrix Beck aurait adoré cette liberté.
La décharge a reçu le prix du livre Inter en 1979.
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Livre phénomène, salué par la critique lors de sa parution en 1987, Néons est un récit exutoire, sans fard ni limites.
Dans ce texte écorché et douloureux, qui n'est rien d'autre qu'une quête éperdue d'amour, Denis Belloc revient sur ses années de jeunesse?: l'enfance sans père, sa mère remariée à un homme qui le maltraite, la découverte à onze ans de son homosexualité dans une pissotière, l'errance puis la prostitution sur les boulevards de Pigalle à Barbès.
La force du récit est de ne rien excuser ni juger de cette dérive implacable et parfois miraculeusement lumineuse. Il n'y a chez Belloc ni misérabilisme, ni regret, juste le pouvoir implacable d'une langue dont l'obscénité et la cruauté tour à tour révulse et fascine.
Avec une interview de Denis Belloc par Marguerite Duras,
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Scénario de La route des Flandres
Claude Simon
- Les éditions du Chemin de Fer
- Micheline
- 12 Avril 2023
- 9782490356362
«Dans la brume jaunâtre des premiers plans du générique, une silhouette grise de dragon 1940, le sabre haut, s'incline sur le côté et s'écroule au ralenti comme un cavalier de plomb mis sur le feu, les pattes de droite du cheval fondant peu à peu tandis que se déchaîne une rafale de coups de mitraillette en même temps que le bruit d'une galopade effrénée.»
On connaît l'immense écrivain, prix Nobel de littérature, mais on oublie trop souvent l'homme d'images, photographe, dessinateur, plasticien polyvalent et visionnaire qu'était Claude Simon.
Alors que La route des Flandres paraît en 1960, Claude Simon met au point, dès l'année suivante, le scénario de son grand roman choral. Ce texte, d'une écriture somptueuse et d'une précision incroyable, publié ici pour la première fois, donne littéralement à voir le film qu'imaginait l'écrivain. Comme l'écrit Mireille Calle-Gruber dans sa riche et passionnante postface, «la lectrice ou le lecteur du scénario émerge, abasourdi, écarquillé, comme halluciné, du vertige d'images ainsi mises en scène, que relient entre elles et les péripéties des émotions humaines et les mouvements de l'oeil inhumain de l'objectif.»
En 1992, après l'échec d'une tentative en 1977 de réaliser lui-même le film, Claude Simon s'accorde avec la réalisatrice Michelle Porte pour donner vie au projet mais pose ses conditions : «Il est pour moi impensable qu'un film soit réalisé à partir de mon roman La route des Flandres sans ma participation et mon approbation à tous les niveaux : découpage, choix et direction des acteurs, décors, musique, tournage.» Face à ces impératifs et en dépit de nombreuses divergences, le film aurait vu le jour sans le refus de l'avance sur recettes qui oblige Michelle Porte à le redimensionner pour la seule télévision. Cela, Claude Simon ne peut l'accepter, ce serait «un peu comme si j'avais à écrire un roman dans un délai imparti, ou si un éditeur me demandait de condenser en cinquante pages un roman de quatre cents».
Le scénario de La route des Flandres est le roman d'un film qui n'aura jamais vu le jour.
Édition établie par Mireille Calle-Gruber. Avec un cahier iconographique de 16 pages, une postface de Mireille Calle-Gruber, suivie des lettres inédites de Claude Simon à Michelle Porte.
«Non seulement j'ai écrit La route des Flandres, mais encore je l'ai vécue. Vous comprendrez alors mon souci que n'intervienne aucune altération de sorte que si je ne me trouvais pas en mesure de donner mon accord sur tous les points, même de détail, le film ne pourrait pas se faire.»
Extrait d'une lettre de Claude Simon à Michelle Porte -
Mitka, jeune marin d'Europe de l'est, rencontre, à Londres, Valerie Brandon dont il tombe éperdument amoureux. Valerie est courtisée par le riche Evershed qu'elle n'est pas sûre d'aimer. L'innocent amour que Mitka lui voue la flatte et lui donne l'illusion qu'un autre choix est possible. L'insatisfaite Valerie est prête à se jouer de Mitka pour se distraire de sa vie ennuyeuse. Comme souvent chez Katherine Mansfield, les femmes sont farouchement libres et mènent la danse, sans scrupule ni souci de morale. Katherina Christidi a saisi l'ironie acide...
Intrépide amour est écrit à la fin de l'année 1914, au moment où Katherine Mansfield vit une crise dans le couple qu'elle forme avec John Middleton Murry et où elle est attirée par l'écrivain français Francis Carco.
Publié en anglais pour la première fois en 1972, Intrépide amour n'avait jamais été traduit en français.
Traduit par Marie-Odile Probst.
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Publié dans Les lettres nouvelles, en février et mars 1958, et jamais réédité depuis, Le cheval est le premier jalon de l'histoire du cavalier-brigadier rescapé des Flandres durant la débâcle de quarante que Claude Simon n'a eu de cesse ensuite de recomposer, à commencer par La route des Flandres, qui paraît deux ans plus tard.
II serait pourtant bien réducteur de considérer Le cheval comme un simple brouillon du roman à venir. Ce «pur cristal taillé, facetté avec art», comme l'écrit Mireille Calle-Gruber dans sa postface, est un récit singulier et autonome, qui éclaire magistralement l'oeuvre de Claude Simon, couronnée en 1985 par le prix Nobel de littérature.
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Adolescente issue d'un milieu aisé, Bibiche est incarcérée pour complicité de vol. Avec elle, c'est la jeunesse et l'insouciance, un souffle de liberté qui entrent dans la prison, qui fascinent et déroutent gardiennes et détenues. C'est aussi une histoire d'amitié avec une autre prisonnière, Dufour, dont la solitude voulue va se trouver désarmée par celle qu'elle prendra sous son aile et finira par appeler «ma fille».
Ecrit en prison en 1962, juste après la rédaction de La cavale, Bibiche est publié pour la première fois en 1973, neuf ans après la disparition d'Albertine Sarrazin. Il n'avait pas été réédité depuis. Albertine Sarrazin quitte l'autobiographie pour y mettre en scène une héroïne nourrie de sa propre expérience - Bibiche à l'âge qu'elle avait lors de son premier séjour en prison. Elle tisse les liens qui se nouent dans l'univers carcéral en entrecroisant les monologues des trois narratrices : Bichiche, Matuchette (la gardienne) et Dufour, qui nous révèlent, non sans suspense, la raison de l'incarcération de Bibiche, et les inquiétudes que sa méconnaissance des codes de la prison font peser sur la tranquillité de ce monde totalement clos.
A l'occasion de la parution de Bibiche, les éditions du Chemin de fer publie un livret biographique de 36 pages, consacré à Albertine Sarrazin, avec de nombreuses photos inédites.
Ce livret est offert, dans la limite des stocks disponibles, pour l'achat de Bibiche.
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La guerre a dévasté l'hémisphère nord, laissant derrière elle un nuage radioactif qui poursuit inexorablement sa course vers le sud, détruisant toute vie humaine sur son passage.
Dwight Towers, le commandant d'un sous-marin américain fait partie des survivants réfugiés en Australie. À Melbourne, il partage le quotidien d'un petit groupe d'habitants qui, chacun à sa façon, pour se préparer à l'inéluctable, s'arrange avec la cruelle réalité.
Lors d'une soirée, Dwight rencontre Moira, une jeune femme qui a choisi de brûler sa vie tant qu'il est encore temps. Bien que Dwight veuille garder vivant le souvenir de sa femme et de ses enfants, lui et Moira deviennent de plus en plus proches.
Seul un mystérieux signal radio provenant de Seattle pourrait laisser penser que la vie n'est peut-être pas anéantie totalement, quand bien même, scientifiquement, elle est devenue impensable au Nord...
Captivant et d'une intense émotion, Le dernier rivage, publié en 1957, est devenu un livre culte qui reste gravé à jamais dans la mémoire des lecteurs.
Nevil Shute (1899-1960) a publié vingt-cinq romans. Le dernier rivage, qui est sans conteste le sommet de son oeuvre, a connu en 1959 une adaptation cinématographie avec Gregory Peck, Ava Gardner et Anthony Perkins. Il sert encore aujourd'hui dans les pays anglo-saxons d'étendard à ceux qui luttent contre les risques de destructions que la technologie humaine fait subir à la Terre.