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Lydie Dattas
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Le livre des anges ; la nuit spirituelle ; carnet d'une allumeuse
Lydie Dattas
- Gallimard
- Poesie Gallimard
- 4 Juin 2020
- 9782072891489
La vie de Lydie Dattas à laquelle son oeuvre est intimement liée est en vérité peu banale : née en 1949, fille du musicien Jean Dattas, organiste de Notre-Dame de Paris, elle écrit très tôt des poèmes et connaît sa première publication à 20 ans au Mercure de France, elle épouse à 23 ans Alexandre Bouglione, se lie d'amitié avec Jean Genet, rencontre Jean Grosjean qui préfacera son livre majeur Le livre des anges, correspond avec Ernst Jünger, avant de partager le chemin de Christian Bobin. Le volume que nous proposons donne bien sûr à lire ce Livre des anges dont la parution eut en son temps un large écho en raison de sa puissance lyrique et de la tonalité étrange du propos entre mysticisme, sensualité et féminité revendiquée. Nous y adjoignons deux livres qui contribuent à complexifier le jugement du lecteur sur le parcours de cette poétesse qui prétend faire prévaloir la puissance du coeur sur le prestige de l'intelligence, et qu'on réduirait en l'enfermant dans le simple registre d'une mystique contemporaine : La nuit spirituelle, écho de ses relations ambivalentes et tourmentées avec Jean Genet, et le récent Carnet d'une allumeuse (ici dans une version nouvelle) qui d'une autre façon revendique la force créatrice de la femme et dénonce les malentendus qui contribuent à la nier en l'enfermant dans le statut d'objet de séduction et de plaisir. Dans un article de La Croix Patrick Kéchichian a justement situé cette poésie entre «mystère et fureur». C'est naturellement Christian Bobin qui offre une magnifique et inspirée préface à cet ensemble poétique insolite et de haute intensité.
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L'arrière-pays de Christian Bobin
Dominique Pagnier, Lydie Dattas, Christian Bobin
- L'Iconoclaste
- 3 Octobre 2018
- 9782378800314
Sa vie, c'est d'écrire. Jamais il n'a bougé du Creusot, sa ville natale, ou seulement pour lui référer la forêt distante de quelques kilomètres. Son oeuvre est immense et singulière. Plus d'une soixantaine de livres qui, entre eux, se font écho. Pourtant il en manquait un qui éclaire l'ensemble. Un livre qui dise son arrière-pays, comment il s'est construit, ce qui l'a formé. Pour y répondre il fallait des écrivains, eux aussi, dont la parole soit juste. Sous leur plume, on comprend. L'enfance au sortir de la guerre, les ombres familiales, les premiers écrits et très tôt l'importance des poètes, des rencontres, des noirs de Soulages et des notes de Bach.
Mais cet éclairage resterait imparfait si Christian Bobin n'avait pas accepté d'ouvrir ses carnets, prolongeant le texte de sa voix, pour que se dessine le sens d'une vie. -
La blonde ; les icônes barbares de Pierre Soulages
Lydie Dattas
- Gallimard
- Blanche
- 6 Novembre 2014
- 9782070147502
«Depuis toujours dans l'histoire de l'humanité, quand les noeuds de la civilisation sont devenus si serrés qu'ils ne laissent plus passer le sang de la Vie, un Barbare arrive avec une hache et dit : "ça suffit". Soulages est ce barbare éclairé qui fait table rase de tout pour retrouver l'essentiel. Dans cet Occident qui valorise les images au détriment des personnes, comment n'être pas fasciné par les présences anthracites du seul prophète de toute l'histoire de la peinture?» Lydie Dattas.
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Dans le couloir rouge aux murs ruisselants de miroirs, chacune de nos déambulations éclaboussait de tain nos jeunesses contraires. Nos chevelures enflammées de pourpre et nos visages carmin juraient un amour éternel. Au centre de ce feu se jouait la plus érotique aventure spirituelle:le dompteur couvrait mon écriture d'une peau de léopard, je jetais sur ses fauves la goutte d'or de la conscience. Lydie Dattas
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Qu'une adolescente paraisse et tous les regards des hommes sont sur elle. Mais elle est étrange et ses yeux couleur cassis couvent des pensées qui la délivrent de toute coquetterie. Vivant sa beauté comme une expérience intérieure, sa quête obstinée de poésie l'éloigne du destin des filles de son âge. Chaque initiation se change en révélation métaphysique. Peu à peu émerge en elle une vision révolutionnaire de la femme dont le présent texte est l'expression. «Je haïssais qu'on me clame belle. Pourtant, aucune expérience aussi profonde que ce moment idiot où je sentis que j'étais la perle qui faisait mourir les hommes. Elle m'apportait ce savoir:le corps des filles n'est pas seulement leur corps, il est aussi leur pensée.»
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Ce livre, Les amants lumineux est un réquisitoire impitoyable contre la société occidentale : chaque phrase est un couteau qui s'enfonce dans le ventre mou du monde. Ici, deux personnes, (Gabriel et Raphaëlle) s'entretiennent d'une troisième : (Mansour). Celui-ci est un jeune théologien de génie. Dans son coeur, l'Orient et l'Occident échangent leurs plus fines pensées sur le bien, le mal et Dieu. Défenseur de la cause palestinienne et chercheur d'or spirituel, Mansour vit comme un saint dans un monde dont la seule loi est la jouissance imposée à tous. Son coeur est lié au coeur de Raphaëlle plus sûrement que la vie à la lumière. Or un jour il l'abandonne et lâche en même temps - dans la même seconde - ce qui faisait le nerf de sa pensée et le brûlant de son coeur : celui qui était le plus singulier rentre dans la cohorte des hommes modernes sans profondeur. C'est de ce drame incompréhensible que s'entretiennent Raphaëlle et Gabriel. Tout le livre est pris dans cet orage dont les éclairs écrivent aussi bien un traité sur l'amour vrai qu'une méditation sur la dernière chance donnée à l'Occident - par l'Orient - pour ne pas se perdre définitivement. Cette chance, incarnée dans le livre par la personne de Mansour, semble bien compromise.
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«On dit que plus un rosier souffre et plus il donne de belles roses. Les jardiniers le savent, qui en plantant cet arbuste lui flanquent rituellement quelques coups, du plat de la pelle. Ainsi en était-il de Genet:chaque heure de souffrance à Mettray, pinçant les cordes de ses nerfs, faisait croître son génie. Bientôt il tirera lui-même de son désespoir, comme d'une harpe merveilleuse, les sons mélodieux du malheur.» Lydie Dattas.
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Le livre des anges est une sorte de passionnaire relatant les macérations douloureuses de la jeunesse : «Je désespère au lieu d'être heureuse de plaire.» Affirmant sa propre pureté, le poète se compare tour à tour aux lys et aux roses comme pour se présenter devant Dieu : «J'ai été le portrait craché des roses rouges.» Il ne s'agit pas pour lui de se glorifier mais de purifier par le langage, comme on lave son visage dans un torrent de montagne. Proclamées de manière éclatante, les vertus revendiquées agissent immédiatement et, sur l'instant, deviennent vraies : elles transfigurent le coeur pour lui faire goûter un printemps incorruptible.
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« Un jour j'ai trouvé Jean Genet assis dans mon fauteuil. Alexandre l'avait rencontré dans la rue et, sachant mon admiration juvénile, l'avait invité chez nous. Le poète ne tarda pas à s'installer dans l'appartement voisin. Le soir même j'entrai joyeusement dans sa chambre pour discuter avec lui, exprimant sans censure mes désaccords à celui dont l'oeuvre avait bouleversé mes seize ans. Genet devint de glace. Le lendemain il signifia à Alexandre mon bannissement : « Je ne veux plus la voir, elle me contredit tout le temps. D'ailleurs Lydie est une femme et je déteste les femmes ». Cette parole qui me rejetait dans la nuit de mon sexe me désespéra. Trouvant mon salut dans l'orgueil, je décidai d'écrire un poème si beau qu'il l'obligerait à revenir vers moi. Surmontant mon désespoir j'écrivis La Nuit spirituelle, pour le blesser aussi radicalement qu'il l'avait fait, lui rendant mort pour mort. Quand je posai ma plume, face à sa haine des femmes luisait le bloc de nuit de mon poème, lequel en lui donnant raison lui donnait tort. La semaine suivante on cogna à la porte : c'était Genet qui venait demander pardon. » (L. D.)
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