Prix littéraires
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Comme un long songe d'hiver, ce nouveau roman de Han Kang nous fait voyager entre la Corée du Sud contemporaine et sa douloureuse histoire.
Un matin de décembre, Gyeongha reçoit un message de son amie Inseon. Celle-ci lui annonce qu'elle est hospitalisée à Séoul et lui demande de la rejoindre sans attendre. Les deux femmes ne se sont pas vues depuis plus d'un an, lorsqu'elles avaient passé quelques jours ensemble sur l'île de Jeju. C'est là que réside Inseon et que, l'avant-veille de ces retrouvailles, elle s'est sectionné deux doigts en coupant du bois. Une voisine et son fils l'ont trouvée évanouie chez elle, ils ont organisé son rapatriement sur le continent pour qu'elle puisse être opérée de toute urgence. L'intervention s'est bien passée, son index et son majeur ont pu être recousus, mais le perroquet blanc d'Inseon n'a pas fait le voyage avec elle et risque de mourir si personne ne le nourrit d'ici la fin de journée. Alitée, elle demande donc à Gyeongha de lui rendre un immense service en prenant le premier avion à destination de Jeju afin de sauver l'animal.
Malheureusement, une tempête de neige s'abat sur l'île à l'arrivée de Gyeongha. Elle doit à tout prix rejoindre la maison de son amie mais le vent glacé et les bourrasques de neige la ralentissent au moment où la nuit se met à tomber. Elle se demande si elle arrivera à temps pour sauver l'oiseau d'Inseon, si elle parviendra même à survivre au froid terrible qui l'enveloppe un peu plus à chacun de ses pas. Elle ne se doute pas encore qu'un cauchemar bien pire l'attend chez son amie. Compilée de manière minutieuse, l'histoire de la famille d'Inseon a envahi la bâtisse qu'elle tente de rejoindre, des archives réunies par centaines pour documenter l'un des pires massacres que la Corée ait connu - 30 000 civils assassinés entre novembre 1948 et début 1949, parce que communistes.
Impossibles adieux est un hymne à l'amitié, un éloge à l'imaginaire, et surtout un puissant réquisitoire contre l'oubli. Ces pages de toute beauté forment bien plus qu'un roman, elles font éclater au grand jour une mémoire traumatique enfouie depuis des décennies.
Traduit du coréen (Corée du Sud) par Kyungran Choi et Pierre Bisiou -
«Je suis la véritable trace, le plus solide des indices attestant de tout ce que nous avons vécu en dix ans en Algérie. Je cache l'histoire d'une guerre entière, inscrite sur ma peau depuis que je suis enfant.» Aube est une jeune Algérienne qui doit se souvenir de la guerre d'indépendance, qu'elle n'a pas vécue, et oublier la guerre civile des années 1990, qu'elle a elle-même traversée. Sa tragédie est marquée sur son corps : une cicatrice au cou et des cordes vocales détruites. Muette, elle rêve de retrouver sa voix. Son histoire, elle ne peut la raconter qu'à la fille qu'elle porte dans son ventre. Mais a-t-elle le droit de garder cette enfant ? Peut-on donner la vie quand on vous l'a presque arrachée ? Dans un pays qui a voté des lois pour punir quiconque évoque la guerre civile, Aube décide de se rendre dans son village natal, où tout a débuté, et où les morts lui répondront peut-être.
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C'est un endroit à l'abri du temps. Ce minuscule hameau, qu'on appelle Les Montées, est un pays à lui seul pour les jumelles Ambre et Aelis, et la vieille Rose.
Ici, l'existence n'a jamais été douce. Les familles travaillent une terre avare qui appartient à d'autres, endurent en serrant les dents l'injustice. Mais c'est ainsi depuis toujours.
Jusqu'au jour où surgit Madelaine. Une fillette affamée et sauvage, sortie des forêts. Adoptée par Les Montées, Madelaine les ravit, passionnée, courageuse, si vivante. Pourtant, il reste dans ses yeux cette petite flamme pas tout à fait droite. Une petite flamme qui fera un jour brûler le monde.
Avec Madelaine avant l'aube, Sandrine Collette questionne l'ordre des choses, sonde l'instinct de révolte, et nous offre, servie par une écriture éblouissante, une ode aux liens familiaux. -
Quels secrets cache l'ombre du jacaranda, l'arbre fétiche de Stella ? Il faudra à son ami Milan des années pour le découvrir. Des années pour percer les silences du Rwanda, dévasté après le génocide des Tutsi. En rendant leur parole aux disparus, les jeunes gens échapperont à la solitude. Et trouveront la paix près des rivages magnifiques du lac Kivu.
Sur quatre générations, avec sa douceur unique, Gaël Faye nous raconte l'histoire terrible d'un pays qui s'essaie malgré tout au dialogue et au pardon. Comme un arbre se dresse entre ténèbres et lumière, Jacaranda célèbre l'humanité, paradoxale, aimante, vivante. -
Une enquête intime sur le suicide de Stefan Zweig à Petrópolis, au Brésil, le 23 février 1942, peu de temps après sa visite à Georges Bernanos. Bâti autour de la conversation que Sébastien Lapaque imagine entre ces deux géants de la littérature du XXe siècle, ce récit miraculeusement lumineux se nourrit de plus de 25 ans de recherches, de voyages et de rencontres. Entre le saccage nazi de la vieille Europe et l'avènement d'un fascisme tropical, une histoire politique et littéraire fascinante, une réflexion poignante sur la tentation du désespoir mais aussi un grand livre d'alerte.
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À la mort de sa mère, Youssef, un professeur marocain exilé en France depuis un quart de siècle, revient à Salé, sa ville natale, à la demande de ses soeurs, pour liquider l'héritage familial. En lui, c'est tout un passé qui ressurgit, où se mêlent inextricablement souffrances et bonheur de vivre.
À travers lui, les voix du passé résonnent et l'interpellent, dont celle de Najib, son ami et amant de jeunesse au destin tragique, happé par le trafic de drogue et la corruption d'un colonel de l'armée du roi Hassan II. À mesure que Youssef s'enfonce dans les ruelles de la ville actuelle, un monde perdu reprend forme, guetté par la misère et la violence, où la différence, sexuelle, sociale, se paie au prix fort. Frontière ultime de ce roman splendide, le Bastion des Larmes, nom donné aux remparts de la vieille ville, à l'ombre desquels Youssef a jadis fait une promesse à Najib. " Notre passé... notre grande fiction ", médite Youssef, tandis qu'il s'apprête à entrer pleinement dans son héritage, celui d'une enfance terrible, d'un amour absolu, aussi, pour ses soeurs magnifiques et sa mère disparue.
Prix Décembre 2024
Prix de la langue française 2024 -
Quand une mendiante muette de Maracaibo, au Venezuela, recueille un nouveau-né sur les marches d'une église, elle ne se doute pas du destin hors du commun qui attend l'orphelin. Élevé dans la misère, Antonio sera tour à tour vendeur de cigarettes, porteur sur les quais, domestique dans une maison close avant de devenir, grâce à son énergie bouillonnante, un des plus illustres chirurgiens de son pays.
Une compagne d'exception l'inspirera. Ana Maria se distinguera comme la première femme médecin de la région. Ils donneront naissance à une fille qu'ils baptiseront du nom de leur propre nation : Venezuela. Liée par son prénom autant que par ses origines à l'Amérique du Sud, elle n'a d'yeux que pour Paris. Mais on ne quitte jamais vraiment les siens.
C'est dans le carnet de Cristobal, dernier maillon de la descendance, que les mille histoires de cette étonnante lignée pourront, enfin, s'ancrer.
Dans cette saga vibrante aux personnages inoubliables, Miguel Bonnefoy campe dans un style flamboyant le tableau, inspiré de ses ancêtres, d'une extraordinaire famille dont la destinée s'entrelace à celle du Venezuela. -
Prix Femina - Roman Etranger 2024
Sélection Prix Femina étranger *** Sélection Prix Médicis étranger *** Sélection Grand Prix des Lectrices ELLE
Le monologue d'une domestique qui retrace, dans un récit lucide, impitoyable et brutal, les étapes menant au drame qui fera s'effondrer le décor d'une vie " propre ".
" Je m'appelle Estela, vous m'entendez ? Es-te-la Gar-cí-a. "
La fillette meurt. Voici le fait par lequel Estela commence son récit. Estela, qui a quitté sa famille dans le sud du Chili pour la capitale où elle travaille comme employée de maison. Estela, qui s'est occupée pendant sept ans de la jeune victime, l'a bercée, nourrie, rassurée, grondée aussi. Qui connaît chaque étape ayant mené au drame : la chienne, les rats, les aveux, le poison, le pistolet. Chaque étape jusqu'à l'inéluctable.
Un roman psychologique haletant, angoissant et addictif, à travers lequel notre époque se dessine - une société fracturée par les rapports de domination et d'argent, où les uns vivent dans l'ombre des autres. -
Choqués par le pogrom perpétré par le Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, et désemparés devant la riposte de l'armée israélienne à Gaza, deux amis français s'échangent des lettres dans lesquelles ils s'inquiètent de la recrudescence des actes et des discours antisémites partout dans le monde.
En tentant de faire passer leurs émotions par le tamis de la réflexion, ils témoignent des effets que le conflit israélopalestinien a pu avoir sur des consciences non-partisanes et non-belliqueuses, qui souhaitent que la justice prévale, que les destructions de vies et de villes cessent, et que le calme revienne sur le terrain autant que dans les esprits.
Assumant la part de fiction que comporte son livre, Paul Audi fait le pari de se glisser dans la peau de ces deux témoins du présent qui n'auraient jamais imaginé que la passion antijuive reviendrait avec tant de force et de présence. Il remonte à la racine d'un mal ancien, jamais disparu, en particulier dans ce Moyen-Orient où les tensions identitaires sont les plus fortes. -
En avril 2022, la mère de Julia Deck est victime d'un accident cérébral. Selon les médecins, ses chances de survie sont infimes. Mais la patiente déjoue les diagnostics. Commence alors un long cheminement, dans l'espoir d'une convalescence, à travers le dédale des établissements de soins. En parallèle, Julia Deck raconte, sur un rythme vif et non dénué d'humour british, la vie de cette femme issue d'une famille ouvrière anglaise, passionnée de littérature, qui s'est élevée socialement, est venue habiter en France, tout en continuant d'entretenir un rapport complexe avec sa famille d'Angleterre. Car au milieu de son histoire, Julia décèle une étrangeté, peut-être un secret - un point aveugle dans le récit de sa filiation. Mais à cette interrogation, seule sa mère, précisément, pourrait répondre. Ce texte splendide, qui questionne les liens entre l'écriture et la vie, est aussi un geste d'amour bouleversant d'une fille envers sa mère.
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En 1984, deux jeunes frères exilés aux États-Unis retournent au Guatemala, au coeur de la forêt de l'Altiplano, participer à un camp de survie pour enfants juifs où les envoient leurs parents afin qu'ils n'oublient pas leurs racines. Mais un matin, les enfants, réveillés par des cris, découvrent que le camp s'est transformé en une chose bien plus sombre. Les raisons et les ramifications de cet épisode de l'enfance du narrateur ne commenceront à s'éclaircir que des années plus tard au fil de rencontres fortuites - à Paris avec une lectrice de Salinger devenue avocate, ou à Berlin avec un ancien instructeur en chef du camp, aux yeux d'un bleu changeant, qui se promenait avec un serpent dans la poche et une énorme tarentule sur le bras. Entrelaçant passé et présent, réalité et fiction, Eduardo Halfon tisse un récit foisonnant de symboles pour toucher du doigt les fondements de son identité : le cadre strict et rigoureux de la religion juive et le giron enveloppant et maternel du Guatemala.
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Le dernier tome de la monumentale biographie de Reiner Stach : les années de jeunesse et de formation, ou comment Franz devient Kafka.
Conclusion de la vaste enquête biographique de Reiner Stach, ce troisième tome est consacré aux années 1883 à 1911, de la naissance de Kafka à la veille de sa grande percée créatrice. Années d'enfance et de silence, années de balbutiements, de premières tentatives littéraires et de lente maturation.
Autant qu'un récit de formation, ce volume est le portrait d'une ville et d'une époque. La ville : Prague, avec son conflit historique de plus en plus brûlant entre Allemands et Tchèques, qui place les Juifs entre le marteau et l'enclume. L'époque : le tournant du xxe siècle, où la montée des conflits sociaux, des idéologies et de l'antisémitisme, les bouleversements intellectuels, scientifiques et technologiques font peu à peu tomber les structures sociales anciennes.
C'est au milieu de ces ruptures que naît et grandit Franz Kafka, enfant isolé pris entre le conflit avec son père et la pression de l'autorité scolaire. Il trouve bientôt dans l'écriture une échappatoire qui, à terme, le ramènera au monde et lui permettra de dénuder la vérité de son époque et de la nôtre. De son premier projet de roman à l'ouverture décisive de son journal, on voit ici, au fil d'une narration virtuose, Franz devenir Kafka. -
Mon frère a passé une grande partie de sa vie à rêver. Dans son univers ouvrier et pauvre où la violence sociale se manifestait souvent par la manière dont elle limitait les désirs, lui imaginait qu'il deviendrait un artisan mondialement connu, qu'il voyagerait, qu'il ferait fortune, qu'il réparerait des cathédrales, que son père, qui avait disparu, reviendrait et l'aimerait.
Ses rêves se sont heurtés à son monde et il n'a pu en réaliser aucun.
Il voulait fuir sa vie plus que tout mais personne ne lui avait appris à fuir et tout ce qu'il était, sa brutalité, son comportement avec les femmes et avec les autres, le condamnait ; il ne lui restait que les jeux de hasard et l'alcool pour oublier.
À trente-huit ans, après des années d'échecs et de dépression, il a été retrouvé mort sur le sol de son petit studio.
Ce livre est l'histoire d'un effondrement.
É. L.
Édouard Louis est écrivain. Il est l'auteur de plusieurs livres autobiographiques qui ont été traduits dans plus de trente langues.
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Emma Fulconis : on ne voit qu'elle à L'Escarène, dans cet arrière-pays niçois où elle est née. Prompte, virevoltante, rebelle à tout, sauf au vent, elle a toujours galopé dans les collines. Enfant déjà, on la surnommait « l'athlète ». Se moquant bien des compétitions, Emma « ne court pas relativement, mais absolument ».
Mais un jour, sa vie bascule : son ami Stéphane Goiran, avec qui parfois elle écoute un peu de musique lors d'une halte, l'invite chez lui. Là, à peine la porte franchie, un chien énorme se jette sur elle, et lui lacère la jambe, ou plus exactement le péroné, également appelé « l'agrafe ». S'ensuivent des mois d'hôpital et de rééducation, à l'issue desquels il est clair qu'Emma ne détalera plus jamais à toute allure.
Mais l'accident ne l'arrête pas dans son élan. Hantée par la phrase du père Goiran expliquant pourquoi il n'a pas retenu son molosse - « Mon chien n'aime pas les Arabes -, elle tente de comprendre ce qu'elle sait déjà, mais dont on ne parle pas. Tenace, elle va surtout trouver en elle la ressource d'un nouveau mouvement, un tremblement d'abord, une oscillation, presque une danse immobile. -
« Ici, la nuit est belle. (...) Leo avance de tache de lumière en tache de lumière et entre les deux, elle disparaît presque entièrement. Elle est alors exactement ce qu'elle paraît être : la fille qui glisse le long des murs, calme, discrète. La fille qui s'efface, la fille qu'on oublie. »
Leo n'est pas rentrée et le printemps s'entête dans sa douceur. Leo ne reviendra pas. La shérif Lauren Hobler découvre son corps au milieu des iris sauvages. Autour de la mort soudaine d'une jeune fille, Les Âmes féroces tisse plusieurs destinées. Pour élucider un mystère, mais lequel?? Celui de Leo, peut-être, et de ses silences. Celui de Lauren, coincée dans une petite ville qui ne la prend pas au sérieux. Il y a aussi Benjamin, Seth et les autres... Les gens de Mercy, qui pensent tous se connaître et en savent si peu sur eux-mêmes.
Envoûtant, surprenant et d'une grande ampleur romanesque, Les Âmes féroces traque la part d'ombre de chacun. -
Et si c'était VRAIMENT vrai?
David Baumer, fondateur d'une start-up parisienne, traverse une crise existentielle. Sa compagne le néglige tandis que son entourage s'absorbe dans les idéologies du moment : relativisme, développement personnel, management agile...
L'une de ses employées, Sheyenne, lui fait découvrir une communauté clandestine de lecteurs de Marc Levy. D'abord moqueur, David plonge finalement dans l'oeuvre du grand romancier, en quête de réponses.
Quelle est donc cette conspiration que David pense avoir perçue dans les textes de Marc Levy ?
Alors qu'il approfondit ses recherches, David se radicalise...
Portraits satiriques de personnages en quête de sens, réflexion sur l'interprétation des textes à l'ère de la "post-vérité', Marc est le premier roman de Benjamin Stock, né à Blois en 1988. -
« Je croyais écrire cette histoire pour mon père, alors que c'était l'inverse : cette histoire, il me l'avait offerte. Et chaque fois que j'ouvrirai ces pages, je le retrouverai comme si je tenais son coeur vivant entre mes mains. »
Quand son père malade le presse d'écrire sur son ancêtre Louis, capitaine des hussards fauché en 1914 dans une charge de cavalerie, Thibault de Montaigu ne sait pas encore quel secret de famille cache cette mort héroïque. Ni pourquoi elle résonne étrangement avec le destin de son propre père qui décline de jour en jour. La course contre la montre qu'il engage alors pour remonter le passé se mue en une enquête bouleversante où se succèdent personnages proustiens et veuves de guerre, amants flamboyants et épouses délaissées.
Thibault de Montaigu nous raconte une lignée hantée par la gloire et l'honneur. Mais aussi ce qu'il reste d'amour et de courage dissimulés dans le coeur des hommes.